Le 19 mai 2007, Élianne célébrait son 18e anniversaire. Elle a d’abord profité d’un souper barbecue chez elle avec trois amies. Elle allait ensuite poursuivre la soirée au Bourbon Street, un bar bien connu de la région des Laurentides à l’époque, avant de rejoindre son amoureux plus tard dans la nuit. Élianne ne s’est jamais rendue à destination.
En tournant dans le stationnement du bar, leur voiture a été frappée violemment par une conductrice en état d’ébriété. Élianne, qui se trouvait à l’arrière, du côté de la collision, a subi un traumatisme crânien sévère. Inconsciente dès l’impact.
Après avoir été stabilisée à l’Hôpital de Saint-Jérôme, Élianne a été transportée à l’Hôpital du Sacré-Cœur-de-Montréal. Elle y a séjourné six semaines aux soins intensifs, et autant de temps aux soins intermédiaires.
Dur moment pour le cœur d’une mère
Il est environ une heure du matin. Jocelyne Parent est en train de s’endormir. Ça sonne à la porte. Ce n’est pas Élianne qui a oublié ses clés comme cela lui est déjà arrivé quelque temps auparavant. Ce sont deux policiers. Sa fille a eu un accident. « C’est exactement ce que tu ne veux pas savoir », se remémore sa mère. Les parents d’Élianne ramassent rapidement quelques affaires, puis se mettent en route vers Sacré-Cœur.
À l’intérieur d’une salle de traumatologie, ils trouvent Élianne dans un coma profond, mais avec une grande équipe de médecins, d’infirmières et d’autres professionnels autour d’elle prêts à tout pour lui sauver la vie. Les complications s’enchainent dans les premiers jours : cerveau qui ne cesse d’enfler, un épisode de pression intracrânienne très haute, une insuffisance rénale transitoire, une pneumonie, un syndrome de détresse respiratoire aigu… Même si l’état d’Élianne ne laissait pas présager un futur prometteur pour elle, l’équipe médicale fait tout en son possible pour l’amener à se réveiller.
Les médecins, que ce soit Dr Bellemare, Dr Bernard, Dr Giasson, Dr Verdant ou Dr Marsolais, répondaient toujours aux questions, aux inquiétudes de Jocelyne : « Ils m’ont permis d’être beaucoup là, de rester au chevet de ma fille. C’était humain, tu sentais qu’il y avait une équipe. Le personnel a pris ça à cœur. » Elle se souvient des infirmières, tout particulièrement d’Angela, qui les a marquées par son écoute et sa bienveillance, des résidents extraordinaires qui ont bien pris soin d’Élianne, et des médecins compétents qui changeaient au fil des gardes, mais qui offraient tous des perspectives différentes qui allaient contribuer à ramener Élianne à la vie.
Après le réveil, la réadaptation
Après plusieurs semaines dans un coma, Élianne se réveille très lentement. Même si elle était encore très absente après son transfert aux soins intermédiaires, elle a tout de même conscience du rôle important que Dr Bellemare et toute l’équipe de la traumatologie ont joué dans sa survie : « Moi j’ai survécu grâce aux soins intensifs de Sacré-Coeur. J’ai pu récupérer mes capacités grâce à ces soins extraordinaires et professionnels. »
En se réveillant du coma, elle repartait de zéro, « comme un bébé qui naît », avoue Élianne elle-même. Voir toutes ces personnes entrer sans arrêt dans sa chambre d’hôpital pour sauver sa vie, entendre les bruits des machines autour d’elle a suscité un mélange d’émotions en elle : de la peur, de la colère. Elle ne comprenait pas, elle ne pouvait pas expliquer ce qu’elle percevait. Cela lui donnait beaucoup d’anxiété. Elle a dû réapprendre à marcher, à parler. Le traumatisme crânien qu’elle a subi a également causé une agnosie visuelle, qui est une difficulté à reconnaître les personnes, les objets ou les endroits. Elle garde aussi des séquelles avec sa mémoire à court terme, en plus de n’avoir jamais pu retrouver la mémoire de sa vie avant 18 ans. « En réadaptation, on savait que ce serait long, on savait que ce ne serait plus jamais pareil non plus. Ça allait de soi qu’on continue. On a eu beaucoup d’aide, même du monde qu’on ne connaît pas. Ça nous a aidés beaucoup. », confie Jocelyne avec gratitude.
En réadaptation, Élianne était très motivée à récupérer un maximum de ses capacités. Ses efforts ont porté leurs fruits. Elle vit aujourd’hui seule en appartement, elle fait de l’improvisation, elle fait beaucoup d’activités avec son amoureux. Elle rédige bénévolement des articles pour le journal Le Phœnix de l’Association Québécoise des Traumatisés Crâniens, deux fois par année.
Encore maintenant, elle conserve des problèmes d’équilibre et d’orientation, ce qui l’empêche de sortir seule de chez elle. Elle a besoin d’aide pour plusieurs tâches, faire son épicerie, par exemple, mais elle peut en faire beaucoup par elle-même aussi. Tout lui demande plus d’énergie et de concentration, mais elle ne laisse rien l’arrêter. « Moi je n’avance pas vite, j’avance avec une canne, mais j’avance pareil. » affirme Élianne avec ténacité. Elle travaille fort depuis plus de 17 ans pour dépasser les limites prédites par les professionnels qu’elle a rencontrés au fil des années. Élianne se bat chaque jour pour retrouver toujours plus d’autonomie.
Un avenir incertain, mais rempli d’espoir et de sourires
Jocelyne est préoccupée pour le futur de sa fille. « Moi j’avance en âge, et Élianne a besoin d’aide pour plusieurs choses dans son quotidien… Après moi, qu’est-ce qui va se passer ? », se demande la mère avec inquiétude. Elle souhaite s’organiser pour rendre la vie d’Élianne aussi facile que possible.
Élianne dit avoir été sauvée par le rire et l’espoir. À l’Hôpital, c’est le rire, ainsi que l’espoir de pouvoir repousser le plafond de ses capacités un peu plus chaque jour, qui lui donnait de l’énergie pour rester réveillée ne serait-ce que deux minutes de plus dans la journée pour faire des exercices complexes afin d’améliorer sa condition physique et mentale. C’est qui elle est : une femme active qui vise à « faire mieux que mieux encore ».
Aujourd’hui, Élianne vit pleinement dans l’instant présent. Elle ne sait pas en quoi consistera son avenir, mais elle sait qu’elle veut continuer à faire ce qu’elle aime et à profiter des moments simples de la vie. Marcher dans la rue, respirer par le nez, donner le sourire aux gens, passer du temps avec ses amis, prendre soin de ses proches, devenir plus autonome : voici ce qu’elle veut pour son avenir, des petits plaisirs simples, mais qui font du bien, autant à elle qu’aux autres. Elle aspire également à sensibiliser la population sur des enjeux qu’elle comprend mieux que personne : les dangers de la route ainsi que la fragilité du cerveau, de la vie humaine.
Perdre la tête ? Le Défi d’Élianne
Sur les encouragements de Dr Bellemare, Élianne a décidé d’organiser sa propre collecte de fonds pour soutenir la Fondation. Le 11 juin dernier, soit 18 ans après son accident, Élianne s’est rasé la tête, un geste courageux pour redonner à l’Hôpital qui a joué un rôle essentiel dans sa survie et pour remercier l’équipe de professionnels qui a si bien pris soin d’elle. « Ce n’est pas un geste assez gros pour exprimer toute la gratitude que j’ai pour cet hôpital-là ainsi que tout le monde qui y travaille, qui y travaillait et qui m’a permis de parler aujourd’hui », explique Élianne.
Par cette collecte, Élianne veut participer à financer la recherche, des projets de santé et l’achat de matériel qui aideront les professionnels de Sacré-Cœur à offrir à tous les patients des traitements d’une grande qualité. Pour Élianne, les personnes qui passent entre les murs de l’Hôpital du Sacré-Cœur ne méritent rien de moins que les meilleurs soins que permet la médecine, comme ceux qu’elle a reçus lorsqu’elle y était.
Élianne porte son message avec un amour et une détermination qui permettent de mobiliser beaucoup de personnes autour d’une mission chère à son cœur : sauver des vies et faire une différence pour les patients qui luttent pour retrouver une meilleure qualité de vie. Son défi de se raser la tête et son appel à la solidarité ont ainsi permis de ramasser plus de 7500 $, un montant impressionnant.
Élianne est heureuse du résultat de son initiative et de ce geste concret de se faire raser la tête, un symbole qu’elle souhaite poursuivre sa vie avec plus de légèreté. Elle a même convaincu certaines personnes de son entourage et une employée des archives de Sacré-Coeur à emboîter le pas et à faire comme elle, en guise de solidarité. Élianne est une véritable source d’inspiration. Sa force et sa volonté d’insuffler de l’espoir trouvent écho chez tous ceux et celles qui ont le privilège de croiser son chemin.